mardi 4 décembre 2007

Héritage du communisme et énergie : l’exemple de Košice

On ne vous apprendra rien en disant que le passé d’une ville détermine son allure actuelle. Et en terme d’histoire récente, il existe une différence importante entre les villes des pays d’Europe de l’Est et Centrale et les autres : le communisme (du bloc soviétique).

Ceci datait sans doute d´avant le communisme


Les territoires appartenant au bloc soviétique ont connu un mode de gestion et de construction particulier privilégiant le collectif à l’individu. Ceci se retrouve notamment dans le domaine de l’énergie et Košice est un bon exemple pour illustrer ces particularités. Nous traiterons ici en particulier trois domaines : l’habitat et son isolation, l’habitat et sa source de chaleur et le transport.

Les immeubles de l’époque : de gros consommateurs en nombres
Un géant qui se trouverait sur la place centrale de Košice et qui regarderait aux alentours pourrait voir aux abords de la ville de nombreux immeubles d’un même style. De 6 à 15 étages, des angles droits, pas de fantaisie, des fenêtres bien alignées, nombreuses et toutes identiques, … des immeubles des années 60 – 70 comme on en trouve aussi en France. Ces immeubles en béton armés ont été construits sans qu’il y ait de réel besoin en logement. A Košice, ils contiennent plus de 30 000 appartements, peut-être le double … Alors qu’il y a 20 ans, une partie de ces appartements étaient vides, aujourd’hui ils affichent complet. De nouvelles constructions vont alors voir le jour ces prochaines années (la ville est attractive).

Le fournisseur de chaleur : ces batiments datent, mais ont ete renoves

Une telle quantité de logements est une aubaine pour accueillir les travailleurs (hommes et femmes) et leur famille dans la ville. Cependant, construire des immeubles sobres en énergie n’était pas une habitude de l’époque et ce sont donc des bâtiments très « énergivore ». Afin de limiter la consommation d’énergie due à l’habitat (souvent 1/3 de la consommation dans les villes), il est donc nécessaire d’entreprendre de grands travaux de rénovation et d’isolation sur ces bâtiments. A Košice, ces travaux sont en cours et 38 % de ces immeubles sont maintenant rénovés. Ces immeubles ont été privatisés à 95 % après la révolution mais la rénovation est largement soutenue (financièrement) par l’état, qui s’est responsabilisé dans cette tâche.

Pour résumer : ces immeubles sont donc un avantages social puisqu’ils offrent une grande quantité de logements mais ils doivent être rénovés, ce qui prend du temps, coûte cher et est une lourde tâche.

Le réseau de chauffage à distance : un potentiel d’efficacité énergétique
Le raisonnement du « collectif » était aussi appliqué pour chauffer les logements des villes. Ainsi, dans la plupart des villes du bloc soviétique comme ici à Košice, on trouve un système de chauffage à distance.

Détail technique : Ce système consiste en une source de chaleur centralisée et une distribution de cette chaleur par l’eau circulant dans un réseau de tubes. L’eau est appelé « fluide caloporteur », c'est-à-dire le fluide qui transporte la chaleur. A Košice, l’eau circule à l’état liquide (eau chaude qui part à 150°C dans 85 % du réseau) et à l’état gazeux (vapeur à 220 °C et à 15 bars dans le reste du réseau). L’eau circulante est chauffée par une source de chaleur (immenses chaudières) et est transportée jusqu’à des échangeurs où elle se refroidit en réchauffant un circuit d’eau qui réchauffe le logement. L’eau refroidie termine son cycle en revenant à la source de chaleur pour repartir faire un tour de la ville.


Le réseau (340 km de tuyaux) couvre 90 % des logements de la ville de 250 000 habitants (les bâtiments excentrés ne sont pas desservis et ont leur propre système de chauffage).

Un ecran de controle d´une partie du reseau


Un tel réseau est complexe et demande une gestion rigoureuse. A Košice, la ville assure une partie de sa gestion (à travers une société appartenant à la commune) : la distribution (200 km de réseau, les nombreuses extrémités terminales). Le transport de la chaleur peut être une source importante de perte d’énergie comme l’ajout de nouvelles étapes d’échange de chaleur. Pourtant, un tel réseau dispose d’un vrai potentiel de limitation des émissions de gaz à effet de serre. Tout d’abord en terme d’efficacité énergétique : comme on l’a vu à Martigny, cette centralisation permet d’utiliser au mieux un combustible (ce qui est différent de la chaudière d’un particulier) car il y a un suivi permanent des performances et un réglage optimum est réalisé ; ensuite, l’utilisation à grande échelle des énergies renouvelables est largement favorisée. En effet, souvent les installations sont plus facilement utilisables à ces dimensions et la décision devra venir du conseil ou du seul fournisseur d’énergie au lieu de plusieurs milliers de particulier. A Košice, un projet d’incorporation de la géothermie est à l’étude et devrait démarrer l’an prochain (la moitié de l’énergie viendra alors de cette source). A Martigny, un projet d’intégration d’une chaudière à bois et un projet de géothermie étaient à l’étude (pour le réseau de chauffage) lors de notre passage.

En résumé : Les réseaux de chauffage à distance disposent d’importants potentiels de réduction des émissions de gaz à effet de serre (efficacité énergétique et énergie renouvelable) et sont aussi créateurs d’emploi localement. Ils sont très difficiles à mettre en place quand un système de chauffage individuel est déjà instauré. En ce sens, c’est un atout pour les villes issues du bloc Košice. Mais il ne suffit pas de disposer d’un potentiel : encore faut il l’exploiter et c’est très compliqué, d’autant que les réseaux déjà en place sont rarement efficaces et nécessitent de lourds travaux et investissements.

Le transport collectif : une évidence de l’époque communiste
Dans les villes françaises (et d’autres pays aussi) souvent la voiture est reine. Les politiques actuelles visent à améliorer le service en matière de transport public et de modes de transports doux (marche, bicyclette, rollers, …). Ceci est compliqué et coûteux mais nécessaire dans une optique de réduction des émissions de gaz à effet de serre, de la consommation d’énergie fossile, de confort, … Les chiffres diffèrent selon les villes et les pays mais par exemple utiliser un bus à Bruxelles en heure de pointe plutôt que la voiture divise par 7,5 les émissions de gaz à effet de serre par kilomètre et par personne.

A Košice, le réseau de transport public est déjà dense et efficace et ce, depuis plus de 20 ans. Les lignes de bus, de trams et de trolleys (bus fonctionnant à l’électricité) se croisent et se suivent toute la journée dans un flot en harmonie avec l’animation de la ville. Les bus et trams ne sont pas toujours récents mais parfaitement fonctionnels. Utiliser les transports en commun est une habitude pour les habitants de Košice.

La voiture a la cote

Un point noir cependant : le mode et le niveau de vie changent dans la ville et avoir une voiture et l’utiliser est symbole de réussite (comme dans tous les pays d’Europe traversés visiblement). De plus en plus d’habitants utilisent la voiture. Pour limiter cette tendance, la ville essaie de rendre moins agréable l’utilisation de la voiture (parkings raréfiés, sens uniques plus nombreux en instaurant au passage plus de zones piétonnes, …) et de rendre plus agréable l’utilisation des transports en communs (en achetant de nouveaux bus par exemple). La ville essaie aussi de conserver toutes ses lignes malgré les plaintes de certains automobilistes.

Résumons : Le transport collectif est un mode de transport plus sobre en énergie et en émissions de gaz à effet de serre. C’est un mode de transport très adapté à la ville. Grâce à la gestion de l’époque communiste, les investissements à réaliser pour rendre ce service efficace et utilisé sont moins importants dans des villes comme Košice qu’ailleurs. Cependant, le maintien du réseau et de l’intérêt des habitants pour ce mode n’est pas aisé et nécessite des efforts importants (il peut être vu parfois comme un mode de transport du passé)…

L’héritage du communisme (dans le domaine de l’énergie) dans les villes comporte son lot d’avantages qu’il convient de valoriser et d’inconvénients qu’il convient d’effacer. La ville de Košice est un bon exemple des efforts à réaliser et qui sont évités. Saura-t-elle tirer le meilleur de sa situation pour devenir une ville sobre en énergie ?

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Bonjour a vous.

Un article bien interessant ma foi, demain, on va visite notre premiere ferme dans un pays anciennement communiste. En ex allemagne de l´est. je crois que ca va etre tres interessant aussi. On essayera de rediger un article similaire, sur l impact du communisme en agriculture.

bon courage et bonne saint nicolas, ca approche parait il.

Anonyme a dit…

Et la St Nicolas dans un ancien pays communiste, c est vraiment quelque chose aussi...
le sujet du prochain article?