mardi 19 février 2008

Un vecteur d’avenir : l’enfant

Notre venue à Salerno a été l’occasion de découvrir la stratégie de communication de la ville concernant des enjeux parfois peu connus de la population car peu ancrés dans les cultures. C’est le cas du monde de l’efficacité énergétique par exemple. La municipalité de Salerno a pris en main son rôle de pédagogue auprès de ses citoyens. Ainsi, elle a mis en place le programme : les 4 A. A comme « Toward class A », A comme « Alimentation » ou encore A comme « Art ». Pendant quatre ans, chaque année, la municipalité choisira un sujet et en fera le thème central autour duquel réfléchiront les 49 écoles de la ville. En sensibilisant les enfants, la municipalité entend sensibiliser toute la population de la ville. Elle considère les enfants comme de futurs citoyens mais aussi comme de formidables vecteurs d’information pour les adultes pour qui les clichés ont souvent la peau dure.

Agréable Salerno

En 2007, c’était l’année de l’énergie avec « Toward Class A », le programme utilisant l’outil Display®.

Une entrée en matière professionnelle

Pour commencer cette campagne de sensibilisation, Giancarlo Savino est intervenu dans toutes les écoles de la ville pendant 1 heure. Durant cette heure, il s’est attaché à faire comprendre les enjeux que représente la maîtrise de l’énergie pour ralentir l’épuisement des ressources fossiles et le réchauffement climatique. En utilisant le poster Display® de leur école, il a ensuite expliqué aux élèves comment ils pouvaient agir à leur niveau, en réduisant leur consommation d’énergie et d’eau par de petits gestes du quotidien. Eteindre les lumières inutiles, fermer le robinet quand on se brosse les dents, ne pas laisser d’appareils en veille lorsque ce n’est pas nécessaire… Les enfants ont compris et même rajouté qu’ils arrêteraient de se raser avec des rasoirs électriques (pour ça, vous n’êtes pas obligé de nous croire).

Des enfants incollables dans le domaine de l'énergie

Un concours d’économie d’énergie

Mais Giancarlo et les enfants n’allaient pas s’arrêter là puisque pour toute l’année 2007 allait être lancer le « Gioca al Risparmio » ou « Grand jeu des économies d’énergie ». Ce jeu a poussé joyeusement les enfants à la recherche des gaspillages d’énergie électrique de leur école toute l’année afin de réaliser des économies. En réalisant des affiches, plaçant des autocollants près des interrupteurs, exposant leurs œuvres d’art à thème sur les murs de l’école, composant des poèmes, les enfants allaient donc se lancer à la chasse au gaspillage.

Du coloriage pour moins de gaspillage

Ce jeu allait même faire l’objet d’un concours des plus importantes économies entre les 49 écoles de la ville. Le vainqueur remportera 100 ampoules basse consommation pour son école, mais toutes les écoles gagneront la moitié des bénéfices des économies réalisées dans leur école grâce à un contrat passé avec la municipalité (qui paie les factures). Elle pourront investir cet argent dans du matériel générateur d’économies (panneaux solaires, ampoules basse consommation, mitigeurs à eau, …).

De la neige aux palmiers

Des résultats épatants

A l’aube de l’annonce des résultats (il manque les mesures de décembre 2007), Giancarlo avait déjà pu constater les effets de cette campagne. Le premier (pour les amateurs de chiffres ou d’argent) : 20 000 € d’économie en électricité pour 2007… Voilà une nouvelle preuve de l’influence des comportements sur les consommations. Ensuite, des centaines ou milliers d’enfants qui ont adopté des gestes plus malins. Mais aussi, un public adulte touché. Giancarlo nous a raconté avec émotion cette histoire rapportée par un père d’élève dont le fils venait désormais tout près de son père pendant qu’il se rasait … pour couper le robinet dès que son père n’en avait plus besoin !

Rouge ou vert, gare aux inutiles lumières

Quelle suite pour cette action ?

Aussi géniale que soit cette opération, elle est lourde à mettre en place, et Giancarlo ne pourra pas tous les ans consacrer un mois aux interventions dans les classes. C’est pourquoi, elle ne sera pas renouvelée telle qu’elle ou pas tous les ans. Cette année, l’accent sera donné sur l’alimentation. Ce sont des professionnels de la restauration, ou des intervenants des entreprises agro-alimentaires de la région (pâtes et produits laitiers notamment) qui se rendront dans les classes cette année 2008.

Amalfi, coin de paradis

En attendant, Giancarlo renouvellera l’affichage des 49 posters Display® 2007 avec les évolutions qu’elles comportent (pour un montant de 300 €), notamment en terme d’économie d’eau, puisque l’affichage a permis d’identifier de gros problèmes de fuites d’eau dans de nombreux bâtiments. Elles serviront de base à une sensibilisation peut-être moins forte même si Giancarlo compte sur les instituteurs et institutrices, maintenant mieux sensibilisés, pour continuer à encourager les économies d’énergie.

Ensuite, plus ponctuellement, d’autres interventions sont envisageables, comme celle qui a eu lieu lors de l’installation des panneaux photovoltaïques sur l’école Mateo Mari. En effet, sur le toit de cette école, des barrières et un escalier ont aussi été fixés afin de permettre aux enfants d’accéder occasionnellement sans danger à l’installation. Une riche idée, qui si elle est reconduite pourrait profiter à de nombreux enfants puisque 11 écoles supplémentaires devraient s’orner de panneaux photovoltaïques prochainement.

Des panneaux accessibles aux enfants : quelle bonne idée !

Quant à Giancarlo, il a beaucoup aimé cette campagne et regrette déjà ses interventions avec les enfants, très réceptifs selon lui : « Per me i bambino sono come delle spugne assorbono tutte le informazion » c’est-à-dire « pour moi, les enfants sont comme des éponges qui absorbent toutes les informations ». Ce qui signifie aussi pour lui qu’il faut être très vigilent quand on travaille avec les bambini.

Pêcheurs d'Islande ?

Sensibiliser les enfants aux enjeux de l’énergie et du changement climatique, c’est contribuer à en faire des citoyens informés et éclairés sur le monde. C’est aussi un moyen d’atteindre un public plus large puisqu’ils pourront aussi en parler dans le cadre familial. C’était l’objectif de Salerno et Giancarlo. Ce sera aussi le nôtre à partir de septembre sur le territoire de la Communauté Urbaine du Grand Nancy, puisque nous voulons faire profiter de notre voyage et de notre expérience à ces enfants.

samedi 16 février 2008

Salerno et son actualité solaire

Notre voyage de deux jours pour atteindre l’Italie nous a permis de tester le train de nuit bulgare, le bus grec, le ferry méditerranéen et le train italien. Nous avons quitté Sofia, traversé la Grèce puis la mer Adriatique pour atteindre Brindisi en Italie d’où nous avons pris un train qui nous a conduit dans la très belle ville de Salerno.

Cette ville d’environ 140 000 habitants se situe sur la côte Ouest de l’Italie dans une région montagneuse. Naples n’est qu’à une heure et la célèbre cité de Pompéi à 30 minutes. C’est ici que nous avons rencontré M. Giancarlo Savino, responsable énergie pour la municipalité, mais aussi responsable de la sécurité au travail et de la sécurité incendie. Pour le domaine de l’énergie, il est responsable du bon fonctionnement des équipements et de la mise en place de projets. La ville se sent concernée par la problématique énergétique et communique à ce sujet. L’une des conséquences en est son adhésion à Energie-Cités fin 2006.

Salerno unit mer et montagne

Nous avons pu parler de plusieurs projets au cours de notre visite, notamment en terme de communication (sujet du prochain article), mais nous considérons qu’à la une de l’actualité énergétique de la ville se trouve le photovoltaïque.

Des ingrédients prêts

En effet, pour commencer, le gouvernement italien a mis en place il y a quelques mois un système d’incitation à l’investissement très avantageux garantissant un revenu fixe par kWh produit pendant 20 ans (environ 0,36 €/kWh, variable selon le degré d’intégration au toit) en plus des bénéfices de la revente de l’électricité. Ensuite, Giancarlo Savino est passionné par la problématique énergétique et porte un grand intérêt pour les énergies renouvelables et la maîtrise de l’énergie. De plus, la ville bénéficie d’un excellent ensoleillement. Enfin, les élus de la ville sont très intéressés par le photovoltaïque, ce que nous avons constaté notamment lors d’une discussion avec Madame le vice-maire.

Giancarlo Savino et ChallenGES Tour

Ces quatre ingrédients judicieusement mélangés permettent à la ville de réfléchir à la mise en place de plusieurs projets d’envergure dans le photovoltaïque.

Rappel : le photovoltaïque permet de convertir de l’énergie solaire en électricité. A ne pas confondre avec le solaire thermique utilisé pour le chauffage de l’eau.

Un premier projet démonstratif

La première et seule installation photovoltaïque installée par la ville a été mise en place sur le toit de l’école Mateo Mari en 2006. A l’époque, le système d’incitation de l’état n’existait pas. Cependant, une autre structure administrative, la province de Salerno, a supporté le lourd investissement que le projet représentait (200 000 € environ) à hauteur de 75 %. Lourd investissement car en effet, le photovoltaïque est très cher et dispose d’un temps de retour sur investissement très long (plus de 20 ans sans interventions). C’est pourquoi il existe des mécanismes incitatifs mis en place par différents pays européens. L’installation a une puissance de 20 kW et permet de produire 20 MWh/an environ. Ce projet a été utilisé pour sensibiliser les enfants de l’école notamment (nous en parlerons dans le prochain article) et a offert une première expérience à la ville dans le secteur, avant d’envisager deux autre projets de grande envergure…

Sur le toit de Mateo Mari

Un grand projet sur les toits de la ville

Le premier des deux projets à l’étude est la couverture des toits de 14 bâtiments municipaux (dont 12 écoles) par des panneaux photovoltaïques. L’étude de faisabilité a été réalisée par M. Giancarlo Savino à l’aide notamment de l’outil Google Earth et de sa bonne connaissance des bâtiments municipaux. L’ensemble du projet aurait une puissance de 800 kW et permettrait donc de produire 800 MWh par an. La difficulté actuelle réside dans le financement de l’investissement qui s’élève 5,4 millions d’euros et qui ne peut pas être pris en charge raisonnablement par la municipalité. Mais financièrement, cet investissement est très intéressant et intéresse déjà des sociétés que Giancarlo rencontre actuellement. En effet, au bout de 20 ans, les revenus de la production d’électricité s’élèveront à plus de 10 millions d’euros !

C'était carnaval

Quand le gigantisme s’applique au photovoltaïque

Ensuite, la municipalité et Giancarlo ont souhaité exploiter une surface inutilisée (et inutilisable pour l’agriculture) qu’elle détient pour la production d’énergie renouvelable. Dans un premier temps, Giancarlo avait pensé à l’énergie éolienne. Des mesures ont été réalisées dans la zone pendant 2 ans. Il s’est avéré que le potentiel de la zone ne permettait pas une exploitation rentable (mesuré en nombre d’heures de bon vent par an par exemple). C’est alors que le nouveau programme d’incitation est apparu et a suggéré l’idée d’une grande centrale photovoltaïque…

Vous avez dit « grande » ? Erreur ! « C’est un pic, c’est un roc, c’est un cap ! Que dis-je ? Un cap ? C’est une péninsule ! »

Bon, … une gigantesque centrale photovoltaïque de 300 000 m² installés sur une surface de 110 ha ! Pour une puissance de 15 MW !

Cependant, ce projet n’est pas encore réalisé et Giancarlo devra également trouver un moyen de le financer. Mais un tel projet montre bien l’ambition et l’enthousiasme de la ville italienne pour les énergies renouvelables.

Que nous réserve l'avenir ?

Après une entrée discrète dans le monde du photovoltaïque, la ville de Salerno va probablement s’y ancrer et pourrait même devenir une ville exceptionnelle dans ce domaine. On peut ici remarquer l’intérêt d’une première expérience, permise en partie par l’incitation de la province, qui donne de la suite dans les idées (notamment du côté des élus). Et si ces projets se concrétisent, Salerno pourrait devenir un exemple remarquable du rôle que peuvent jouer les autorités locales dans le développement des énergies renouvelables…

mardi 5 février 2008

Bulgarie, des acteurs de poids

Nous n’allons pas vous le cacher : nous avons quitté la Bulgarie pour rejoindre des cieux plus cléments (d’un point de vue météorologique) en Italie. Mais avant de quitter ce pays, nous nous sommes rendus à Sofia quelques jours afin d’y rencontrer quelques uns des acteurs importants oeuvrant pour l’efficacité énergétique en Bulgarie. Il s’agit de l’organisation EnEffect, du réseau EcoEnergy et du Fond Efficacité Energétique de Bulgarie. De part la densité de leurs activités et la complexité du contexte bulgare, chacun de ces acteurs justifierait un article. Cependant pour que l’actualité ne s’éloigne pas trop de ce blog, les informations seront ici condensées.
La neige resistait encore un peu a Sofia

En Bulgarie, les trois obstacles principaux se dressant sur le chemin vers l’efficacité énergétique sont institutionnel, financier et dus à un défaut de connaissances. Voici une présentation de trois acteurs importants qui, chacun à leur façon, contribue à surmonter ou éliminer ces obstacles.

Vous remarquerez aussi qu’en Bulgarie, la question énergétique est presque toujours traitée en utilisant l’expression « efficacité énergétique ». Nous avons l’ambition d’expliquer ces termes assez intuitifs mais difficile à définir car s’appliquant à différentes échelles.

EcoEnergy, un réseau qui marche

C’est en 1997 que les maires de 23 villes bulgares fondent le réseau EcoEnergy avec notamment le soutien financier de l’USAID. L’idée de départ était de partager les expériences de chacun dans le domaine de l’efficacité énergétique. Aujourd’hui, cet objectif s’inscrit dans une démarche plus globale dont voici les principales actions :

- Aider les municipalités membres à identifier des sources d’économies d’énergie (ex. : diffusion d’un programme de monitoring des consommations énergétiques) puis à formuler des plans d’efficacité énergétique

- Assister les échanges d’expériences de projets dans le domaine de l’efficacité énergétique entre les villes membres (ex. : mise à jour d’une base de données, organisation d’évènements réunissant les villes membres)

- Contribuer au développement des capacités institutionnelles et humaines capables de développer et gérer des projets et programmes qui relèvent du domaine de l’efficacité énergétique (ex. : organisation de formations, tenue de conférences)

- Collecter et diffuser les informations sur les innovations technologiques ou institutionnelles (comme les ESCO) (ex. : à travers des conférences, évènements, la newsletter mensuelle)

- Encourager les efforts communs des villes visant à influencer la politique de l’état quant à la mise en place de fonds spéciaux pour le financement de projets d’efficacité énergétique municipaux

La Cathedrale de Sofia

Aujourd’hui, 41 villes sont membres de ce réseau (dont 18 à travers l’association des villes du Danube, membre collectif). C’est EnEffect qui assure le secrétariat du réseau et en particulier Kalinka Nakova, notre interlocutrice principale en Bulgarie (c’est aussi elle qui a organisé notre séjour dans ce pays en collaboration avec les villes membres). Ce réseau est actif et fonctionne bien. Ses activités sont financées principalement par le projet « Stratégie pour l’Efficacité Energétique pour atténuer les émissions de GES » s’inscrivant dans le cadre du Programme de Développement des Nations Unies.


Kalinka et Hristo nous entourant

Un fond capital & efficace

« Pourquoi un fond ? Pour surmonter l’obstacle financier pardi » nous direz-vous, et bien pas seulement.

C’est en 2004 qu’est décidé la création du Fond Efficacité Energétique de Bulgarie alors que l’Acte pour l’Efficacité Energétique est adopté par le parlement bulgare. Le capital de départ provient d’un programme de la Banque Mondial (10 M$), du gouvernement autrichien (1,5 M€), du gouvernement bulgare (1,5 M€) et des dons de plusieurs compagnies bulgares.

Ce fond fournit tout d’abord une assistance technique aux entreprises, municipalités et particuliers qui développent un projet d’investissement pour l’amélioration de l’efficacité énergétique. Cette assistance consiste en un contrôle de l’audit énergétique et un contrôle technique et financier du projet. Ensuite, si le projet soumis est approuvé, le fond apporte son soutien financier :

- soit en finançant tout ou partie de l’investissement avec un taux d’intérêt très bas (2 à 3 % contre 6 à 7 % pour une banque commerciale)

- soit en apportant la garantie auprès d’une banque nécessaire à l’obtention d’un crédit


Une petite place

Le mode de gérance de ce fond est très particulier. Il réunit des partenaires privés et des partenaires publics (représentants de ministères et de l’agence nationale de l’énergie) pour les grandes orientations et est géré par un consortium de trois acteurs privés pour la gestion journalière. Ce consortium est constitué de la compagnie de consultance canadienne Econoler et d’EnEffect notamment.

Les RESULTATS : le fond a commencé à fonctionner le 1er janvier 2006. Au 30 juin 2007, 26 projets avaient été approuvés et 24 financés pour un montant de 4,2 M€. Pour ces projets, 179 tonnes d’équivalents pétrole étaient économisées par an pour 3117 t CO2. Jusqu’aujourd’hui, tous les projets ont été des succès et aucun problème de remboursement n’est à dénoter. Ce fond présente l’avantage d’être flexible (la durée du contrat peut être allongée en cours si nécessaire et justifié, le remboursement intégral plus rapide est aussi possible).

Une limite importante à l’acceptation des projets est leur court temps de retour sur investissement (<5>. Une autre limite qui est aussi son atout, c’est le haut niveau de contrôle des projets qui nécessite un haut degré d’aboutissement des dossiers.

L’obstacle financier peut ainsi être franchi. Mais ce fond apporte aussi un soutien au défaut de connaissance par son expertise technique et financière ainsi que grâce à la diffusion du catalogue des projets déjà approuvés. Enfin, il encourage l’implication de nouvelles institutions en incitant (par des contrats notamment) de nouvelles banques à financer ce type de projet et en réalisant des projets avec de nouvelles compagnies (nouvelles ESCO).

Curiosite : les magasins bas ou souterrains


EnEffect : un centre influent

Et enfin voici un acteur central de la promotion de l’efficacité énergétique en Bulgarie auprès des autorités locales et centrales. Fort de ses 15 experts (ingénieurs, économistes, architectes…), le centre pour l’efficacité énergétique EnEffect, créé en 1992, agit sur différents terrains afin de surmonter les obstacles barrant l’accès à une utilisation plus efficace de l’énergie.

Ainsi, d’une part, afin d’améliorer la connaissance des acteurs travaillant en connexion avec l’énergie (employés municipaux, industriels, architectes etc.), EnEffect organise entre autres des formations au management énergétique. Il propose une aide à la production d’un plan municipal d’efficacité énergétique. Le centre réalise aussi des outils de travail. On peut citer le logiciel de monitoring énergétique, qui a permis par exemple à la ville de Svishtov de débusquer des sources d’économies d’énergie de certains de ses bâtiments municipaux et d’entreprendre des travaux de rénovation. Ce logiciel est distribué par EcoEnergy. Et avec cet outil, une assistance technique complète est proposée, EnEffect centralisant les données de consommation énergétique de toutes les villes dotées de ce logiciel. Le centre fait aussi office de relais entre les projets européens destinés aux villes européennes et les villes bulgares. Ces dernières en sont informées et peuvent être aidée dans la constitution de projets. Elles ont accès à des fonds, qui peuvent aider à surmonter la barrière financière.

D’autre part, le centre cherche à enrichir le système institutionnel afin de faciliter l’accès à l’efficacité énergétique. Par exemple, un des problèmes en Bulgarie pour la rénovation de l’habitat particulier est que chacun des propriétaires d’appartements dans un immeuble investit indépendamment et en ordre dispersé dans des travaux de rénovation. Or techniquement c’est une aberration car si les pertes sont réduites au niveau des surfaces rénovées, elles vont s’amplifier par les autres appartements non isolés, annihilant ainsi les effets de l’investissement.

Pour encourager l’investissement collectif, beaucoup plus efficace, EnEffect a contribué à la proposition de loi accordant aux associations de propriétaires le droit de contracter un crédit. Cette loi va être votée dans un mois.

Le centre contribue à la création et au développement de structures nouvelles dans le paysage de l’efficacité énergétique. Elle a coopéré au développement des partenariats public privé en encadrant des projets pilote. C’est le cas par exemple du contrat entre la ville de Lom et la firme ESCO Enemona, concernant la rénovation thermique d’un bâtiment public. Cf un article récent

EnEffect, EcoEnergy et Energie-Cités collaborent en Bulgarie sur plusieurs projets. Actuellement, le projet Display rencontre un certain succès (31 villes participantes, 2ème pays après la France) en particulier au sein du réseau EcoEnergy. Une personne d’EnEffect fait partie de l’équipe du projet. Le projet MODEL est coordonné en Bulgarie par EnEffect. 5 villes (dont Smolyan d’EcoEnergy) prennent part comme villes pilotes au projet. Ce projet prévoit entre autres d’encourager la mise en place d’une stratégie énergétique municipale et la création d’un poste de responsable de la gestion énergétique dans la commune. Ce projet vient d’être récompensé par la Commission Européenne comme projet le plus prometteur. Vous trouverez ici un lien pour un article plus complet.

Bonjour Messieurs

Ces trois acteurs ont eu, ont et auront un rôle capital à jouer pour la promotion de l’efficacité énergétique en Bulgarie. Mais ceux-ci pourront faire des pieds et des mains, la situation n’évoluera que si tous les acteurs, et en particulier les consommateurs (particuliers, municipalités, entreprises) s’impliquent avec l’objectif d’améliorer leur utilisation de l’énergie. Ce qui est dans leur intérêt, tout comme dans celui de milliard d’autres personnes.

samedi 2 février 2008

La gazification à Pazardzhik : un pas en avant

Et pour finir notre série EcoEnergy, nous avons fait halte à Pazardzhik (prononcer « Pazardjik »). Située à 150 km de Plovdiv en direction de Sofia, elle se déploie en fond de vallée en bordure des Monts Rhodopes. Parmi ses 80 000 habitants, on compte la plus importante communauté Rom (mais bien sûr, il ne s’agit pas là de l’unique superlatif de cette ville, on peut aussi évoquer son théâtre, le plus grand de Bulgarie, pour les autres, il faudra qu’on y retourne…). C’est une ville colorée, où il fait bon se promener dans ses rues piétonnes animées.

Le bâtiment de la mairie permet une vision d'ensemble de la ville

C’est aussi une ville qui a pris tôt en main sa gestion de la protection de l’environnement (dans le référentiel bulgare). Ainsi, c’est la première ville bulgare de cette taille à avoir mis en place un plan de gestion de l’environnement sur le long terme (ce dernier point est justifié notamment par le long temps de retour sur investissement des équipements environnementaux). Un département environnement d’une petite dizaine de personnes est très actif et met en place de nombreux projets afin de sensibiliser la population à cette question. De plus, est employé depuis une dizaine d’année, un chef expert en efficacité énergétique, Emilia Deliradeva, qui œuvre en collaboration avec les autres services techniques. La préoccupation de la question énergétique à Pazardzhik a été précoce. La ville faisait partie des fondatrices du premier réseau de ville à vocation d’échanges de bonnes pratiques dans le domaine énergétique qui est devenu EcoEnergy. Depuis, elle a aussi adhéré à l’association Energie-Cités (l’une des 2 villes en Bulgarie avec Sofia, EcoEnergy en est un membre collectif).

L’arrivée en 1996 du gaz naturel dans la ville a constitué une opportunité pour la ville. L’année suivante, Pazardzhik projetait de procéder à la conversion gasoil/gaz naturel des installations de chauffage de ses bâtiments publics en plusieurs années. C’est le processus de conversion et son intérêt qui va nous intéresser ici.

Des rues animées

Le gaz naturel, un choix meilleur

La ville étant située en fond de vallée, son air se renouvelle moins facilement. Les gaz et particules polluantes émises dans l’air dans la ville s’accumulent donc facilement. Or, la combustion du gasoil (à des fins de chauffage, de transport, …) est une source importante de pollution de l’air contrairement à celle du gaz naturel. Dans ce cas, la conversion est nécessaire pour des raisons de santé publique et environnementales. D’un point de vue économique direct (c’est-à-dire sans prendre en compte les effets indirects comme ceux sur la santé publique ou l’environnement), le gaz s’avérait aussi plutôt avantageux pour la ville. Enfin, le gaz naturel présente des avantages en termes d’efficacité énergétique et d’émissions de gaz à effet de serre par rapport au gasoil.

Le point de rencontre de la ville

Le gaz naturel, un meilleur candidat en terme d’émissions de gaz à effet de serre

Le gaz naturel présente plusieurs avantages en terme d’efficacité énergétique par rapport au gasoil. Nous allons réaliser ici une comparaison superficielle de leur « cycle de vie » de l’extraction à l’utilisation finale.

- Extraction : L’extraction de pétrole, matière très dense et visqueuse, est plus coûteuse énergétiquement que celle du méthane, gazeux, contenu dans des cavités souterraines. Avantage gaz.

- Transport : Une nouvelle fois, la densité et la viscosité du pétrole en font une matière contraignante à transporter. Pour le gaz c’est plus simple (gazoduc). Nous ne nous étendons pas trop sur ce point par manque d’informations (le pétrole ou ses produits sont transportés de différentes façons). La densité énergétique du gasoil est plus importante (1 kg contient plus d’énergie qu’1 kg de gaz, donc il est nécessaire de transporter un peu moins de ce produit que de gaz pour une consommation d’énergie finale constante). Malgré ce dernier point : avantage gaz.

- Transformation : le gaz ne nécessite pas de transformation, le pétrole est raffiné, ce qui est coûteux énergétiquement. Avantage gaz.

- Combustion : c’est l’étape qui concerne directement le consommateur en général, les autres lui sont indirectement liées. L’efficacité énergétique des chaudières à gaz et celle des chaudières à gasoil est sensiblement la même pour les équipements les plus récents, mais la combustion du méthane est plus complète (seulement des liaisons C-H). L’efficacité énergétique (rapport de l’énergie récupérée par la réaction chimique sur l’énergie chimique potentielle récupérable avec une réaction parfaite) de la réaction de combustion est supérieure pour le gaz. Avantage gaz.

Finalement, par ses différents avantages à chaque étape, le gaz est une ressource énergétique présentant une efficacité globale supérieure. Ceci peut se traduire en terme d’émissions de gaz à effet de serre : la littérature annonce -45 % pour le gaz (à quantité d’énergie finale utilisé identique), rien que ça !

Voilà présentés les intérêts d’une conversion vers le gaz naturel. Voyons maintenant les modalités de celle-ci à Pazardzhik.

Scène de vie

Un processus de conversion optimisé

Etape par étape, le processus de mutation a vu le jour, le contexte économique et énergétique variant au cours des années.

A Pazardzhik, la conversion est intervenue dans les années qui ont suivi l’arrivée du gaz pour les raisons évoquées plus haut. Comme Rome, elle ne s’est pas faîte en 1 jour. La ville a utilisé différents moyens pour financer cette transition selon les opportunités et sa santé financière.

Trois étapes conduisirent à la conversion de 65 des 67 bâtiments communaux. Lors de la première, en 1998, 41 bâtiments essentiellement scolaires ont été concernés. L’investissement de 450 000 €, a été assumé par la firme, et celle-ci a été remboursée par la ville progressivement pendant les 5 années qui ont suivi. Mais aucun contrat particulier n’a été scellé entre les deux parties. C’est un simple crédit que la firme a accordé à la ville, les deux partis n’ayant pas mis en place un réel partenariat public/privé, ou alors dans une forme très simple et commune. Lors de la seconde étape, en 2000, c’est en répondant à un appel à projet proposé par la Suisse, que la ville se vue accorder la somme de 160 000 €. Celle-ci correspondait à l’investissement dans la conversion de 19 autres bâtiments. La troisième série de conversion, en 2002, a simplement été financée par des crédits bancaires, et a permis la conversion de 5 bâtiments, avec un investissement de 83 150€.

Et bien sûr les deux bâtiments publics réfractaires (installation sportive, lycée) ne le seront plus pour longtemps, puisque leur conversion pour le gaz aura lieu cette année 2008.

Les services urbanismes en particulier sont aux derniers étages...

La tendance à la conversion gasoil/gaz se fait sentir aujourd’hui dans la plupart des villes bulgare. Même si il ne s'agit pas un remède miracle, on peut accueillir cela comme une bonne nouvelle pour de nombreux aspects. Cependant, Pazardzhik est l’unique ville que nous avons étudiée aussi avancée dans ce processus. La ville a su pour cela diversifier ses sources de financements. Nous avons pu constater son savoir faire en terme de financement de projets à finalité d’efficacité énergétique pour deux autres projets : l’élaboration d’un business plan robuste pour la rénovation de l’éclairage public (qui a permis d’obtenir un crédit d’une banque, crédit qui fut même étendu) et la mise en place d’un véritable partenariat public privé avec la firme ENEMONA (inévitable) qui est en cours pour la rénovation thermique de 7 écoles maternelles de la ville.