samedi 2 février 2008

La gazification à Pazardzhik : un pas en avant

Et pour finir notre série EcoEnergy, nous avons fait halte à Pazardzhik (prononcer « Pazardjik »). Située à 150 km de Plovdiv en direction de Sofia, elle se déploie en fond de vallée en bordure des Monts Rhodopes. Parmi ses 80 000 habitants, on compte la plus importante communauté Rom (mais bien sûr, il ne s’agit pas là de l’unique superlatif de cette ville, on peut aussi évoquer son théâtre, le plus grand de Bulgarie, pour les autres, il faudra qu’on y retourne…). C’est une ville colorée, où il fait bon se promener dans ses rues piétonnes animées.

Le bâtiment de la mairie permet une vision d'ensemble de la ville

C’est aussi une ville qui a pris tôt en main sa gestion de la protection de l’environnement (dans le référentiel bulgare). Ainsi, c’est la première ville bulgare de cette taille à avoir mis en place un plan de gestion de l’environnement sur le long terme (ce dernier point est justifié notamment par le long temps de retour sur investissement des équipements environnementaux). Un département environnement d’une petite dizaine de personnes est très actif et met en place de nombreux projets afin de sensibiliser la population à cette question. De plus, est employé depuis une dizaine d’année, un chef expert en efficacité énergétique, Emilia Deliradeva, qui œuvre en collaboration avec les autres services techniques. La préoccupation de la question énergétique à Pazardzhik a été précoce. La ville faisait partie des fondatrices du premier réseau de ville à vocation d’échanges de bonnes pratiques dans le domaine énergétique qui est devenu EcoEnergy. Depuis, elle a aussi adhéré à l’association Energie-Cités (l’une des 2 villes en Bulgarie avec Sofia, EcoEnergy en est un membre collectif).

L’arrivée en 1996 du gaz naturel dans la ville a constitué une opportunité pour la ville. L’année suivante, Pazardzhik projetait de procéder à la conversion gasoil/gaz naturel des installations de chauffage de ses bâtiments publics en plusieurs années. C’est le processus de conversion et son intérêt qui va nous intéresser ici.

Des rues animées

Le gaz naturel, un choix meilleur

La ville étant située en fond de vallée, son air se renouvelle moins facilement. Les gaz et particules polluantes émises dans l’air dans la ville s’accumulent donc facilement. Or, la combustion du gasoil (à des fins de chauffage, de transport, …) est une source importante de pollution de l’air contrairement à celle du gaz naturel. Dans ce cas, la conversion est nécessaire pour des raisons de santé publique et environnementales. D’un point de vue économique direct (c’est-à-dire sans prendre en compte les effets indirects comme ceux sur la santé publique ou l’environnement), le gaz s’avérait aussi plutôt avantageux pour la ville. Enfin, le gaz naturel présente des avantages en termes d’efficacité énergétique et d’émissions de gaz à effet de serre par rapport au gasoil.

Le point de rencontre de la ville

Le gaz naturel, un meilleur candidat en terme d’émissions de gaz à effet de serre

Le gaz naturel présente plusieurs avantages en terme d’efficacité énergétique par rapport au gasoil. Nous allons réaliser ici une comparaison superficielle de leur « cycle de vie » de l’extraction à l’utilisation finale.

- Extraction : L’extraction de pétrole, matière très dense et visqueuse, est plus coûteuse énergétiquement que celle du méthane, gazeux, contenu dans des cavités souterraines. Avantage gaz.

- Transport : Une nouvelle fois, la densité et la viscosité du pétrole en font une matière contraignante à transporter. Pour le gaz c’est plus simple (gazoduc). Nous ne nous étendons pas trop sur ce point par manque d’informations (le pétrole ou ses produits sont transportés de différentes façons). La densité énergétique du gasoil est plus importante (1 kg contient plus d’énergie qu’1 kg de gaz, donc il est nécessaire de transporter un peu moins de ce produit que de gaz pour une consommation d’énergie finale constante). Malgré ce dernier point : avantage gaz.

- Transformation : le gaz ne nécessite pas de transformation, le pétrole est raffiné, ce qui est coûteux énergétiquement. Avantage gaz.

- Combustion : c’est l’étape qui concerne directement le consommateur en général, les autres lui sont indirectement liées. L’efficacité énergétique des chaudières à gaz et celle des chaudières à gasoil est sensiblement la même pour les équipements les plus récents, mais la combustion du méthane est plus complète (seulement des liaisons C-H). L’efficacité énergétique (rapport de l’énergie récupérée par la réaction chimique sur l’énergie chimique potentielle récupérable avec une réaction parfaite) de la réaction de combustion est supérieure pour le gaz. Avantage gaz.

Finalement, par ses différents avantages à chaque étape, le gaz est une ressource énergétique présentant une efficacité globale supérieure. Ceci peut se traduire en terme d’émissions de gaz à effet de serre : la littérature annonce -45 % pour le gaz (à quantité d’énergie finale utilisé identique), rien que ça !

Voilà présentés les intérêts d’une conversion vers le gaz naturel. Voyons maintenant les modalités de celle-ci à Pazardzhik.

Scène de vie

Un processus de conversion optimisé

Etape par étape, le processus de mutation a vu le jour, le contexte économique et énergétique variant au cours des années.

A Pazardzhik, la conversion est intervenue dans les années qui ont suivi l’arrivée du gaz pour les raisons évoquées plus haut. Comme Rome, elle ne s’est pas faîte en 1 jour. La ville a utilisé différents moyens pour financer cette transition selon les opportunités et sa santé financière.

Trois étapes conduisirent à la conversion de 65 des 67 bâtiments communaux. Lors de la première, en 1998, 41 bâtiments essentiellement scolaires ont été concernés. L’investissement de 450 000 €, a été assumé par la firme, et celle-ci a été remboursée par la ville progressivement pendant les 5 années qui ont suivi. Mais aucun contrat particulier n’a été scellé entre les deux parties. C’est un simple crédit que la firme a accordé à la ville, les deux partis n’ayant pas mis en place un réel partenariat public/privé, ou alors dans une forme très simple et commune. Lors de la seconde étape, en 2000, c’est en répondant à un appel à projet proposé par la Suisse, que la ville se vue accorder la somme de 160 000 €. Celle-ci correspondait à l’investissement dans la conversion de 19 autres bâtiments. La troisième série de conversion, en 2002, a simplement été financée par des crédits bancaires, et a permis la conversion de 5 bâtiments, avec un investissement de 83 150€.

Et bien sûr les deux bâtiments publics réfractaires (installation sportive, lycée) ne le seront plus pour longtemps, puisque leur conversion pour le gaz aura lieu cette année 2008.

Les services urbanismes en particulier sont aux derniers étages...

La tendance à la conversion gasoil/gaz se fait sentir aujourd’hui dans la plupart des villes bulgare. Même si il ne s'agit pas un remède miracle, on peut accueillir cela comme une bonne nouvelle pour de nombreux aspects. Cependant, Pazardzhik est l’unique ville que nous avons étudiée aussi avancée dans ce processus. La ville a su pour cela diversifier ses sources de financements. Nous avons pu constater son savoir faire en terme de financement de projets à finalité d’efficacité énergétique pour deux autres projets : l’élaboration d’un business plan robuste pour la rénovation de l’éclairage public (qui a permis d’obtenir un crédit d’une banque, crédit qui fut même étendu) et la mise en place d’un véritable partenariat public privé avec la firme ENEMONA (inévitable) qui est en cours pour la rénovation thermique de 7 écoles maternelles de la ville.

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